Lettre au séducteur
Il fallait oser -et je le fis !...- envoyer ce poème à un bellâtre follement sexy ,un de mes copains de l'époque; non que son contenu soit tellement
sulfureux, mais sa facture et son style étaient en TOTAL décalage avec le personnage . En apparence! ...et ce fut bien là ma victoire, car la flèche toucha le centre de la cible ....
Je dois vous préciser que ma rousseur flamboyante ne le laissa pas indifférent .
Voici donc ce texte , que je lui envoyai, et qu'aujourd'hui (il me le pardonnera) j'offre aux vents humaines....
Il m’est d’un doux penser
De vous savoir rêvant, ce soir de lune rousse,
Aboyant en silence (par respect pour les chiens),
Vos longues trilles de désirs…
Vous savoir caressant, des mains soyeuses du sommeil,
la lumière devenue blanche,
parlant les mille langues du feuillage,
palpant l’écorce, et puis le tronc…
Il m’est d’un doux penser
De me voir nue au sabbat de vos rêves,
Dansant
Presqu’immobile
Presqu’île ou aile
Au creux de votre souffle
Statue de sel
Que les chèvres du matin
Viendront lécher avec délices
(frisson qui remonte l’échine)
Il m’est doux de sentir, nue encore
Le vent de vos regards
A la courbure de mes reins,
Aux contreforts de l’impatience…
Mais peut-être ce soir,
En cette nuit que vous m’aviez dédiée –ayez-en souvenance !-
Peut-être craignez-vous ces sortes-là de sables ?
Fermez bien vos fenêtres et shutez bien vos doors,
CAR C’EST CE SOIR LA LUNE ROUSSE
En sa splendeur opalescente…
Peut-être craignez-vous
Cet étrange fourmillement
Derrière vos propres yeux
Comme chuintements
Aux murs d’anciens greniers …
Hologramme obstiné
Qui s’imprime
A chaque coin de chaque page que vous tournez…
CHASSEZ CETTE PENSEE !
A chaque battement
-que pourtant vous ralentissez-
de vos paupières si bien domptées
CHASSEZ CETTE PENSEE !
A chaque inspir
A chaque expir
De votre compagne si bien aimée…
CHASSEZ CETTE PENSEE !
Qui vous appelle?
-voix acide et filigramminée-
qui vous appelle et qui vous donne
des prénoms d’arbres et de fougères?...
Aux babines lui vient une ombre de sourire, vous l’entendez …
(oh ! comme vous l’entendez !...)
Car c’est la Nuit de la Renarde,
Et deux fois l’an l’y trouverez…
Nuits d’équinoxe, nuits sidérales,
Deux fois l’an vous y convierai !
Si le penser vous en est doux,
Equinoxe au printemps,
Equinoxe à l’automne,
Nous livrerons, aux antiques repaires,
Les duels ancestraux
Puis nous remonterons à la source du Geste…
Ainsi, renardement, pourrons clowner l’aurore…
le 15/04/87 à
CS
Jeanne
Djoumpey